« Le Lambeau » de Philippe Lançon

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Je ne me suis pas précipitée pour lire ce livre. Simplement parce que je n’aime pas lire ce genre de choses. Les attentats, ce n’est pas n’importe quoi, lire les récits des gens qui les ont subis, qui ont survécu, héros malgré eux,c’est un peu comme faire du voyeurisme. Je ne dis pas que ça en est, je dis ce que je ressens, moi. Je trouve qu’il y a quelque chose de malsain à tourner les pages, une tasse de thé à la main, en s’apitoyant sur le sort des victimes. Peut-être que c’est nécessaire pour leur reconstruction, mais je ne me sens pas psychologue. Alors, pourquoi ai-je acheté ce livre-ci me demanderez-vous ? Bon, je faisais ma provision de livres à la FNAC et je suis tombée dessus. Comme je comptais acheter aussi le dernier Houellebec, on était le 7 janvier 2019, je me suis dit que ce serait bien pour une fois de lire aussi le témoignage de quelqu’un qui était « là ».
Je connais l’auteur, Philippe Lançon, ça m’arrive de lire Libé. Charlie Hebdo, non, je ne l’ai acheté qu’une fois après l’attentat, comme tout le monde en soutien au journal et à l’idée que l’on doit pouvoir s’exprimer librement.
Et… j’ai été bouleversée par la puissance et la sincérité du récit.
Le lambeau, de qui, de quoi ? Ma mère disait d’un vêtement usé «  ça s’en va en lambeaux », je m’imaginais mon pull favori déchiqueté, dernière étape avant l’anéantissement.
Morceau de chair, de sang, de visage parti en lambeaux.
Le récit avant l’attentat, de la vie d’avant, de ce qui s’est passé, et surtout de ce qui s’est passé pour lui, après l’attentat, dans la salle de rédaction de Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015. Attentat où Philippe Lançon a été grièvement blessé.
« La brume se levait. Le silence fabriquait le temps et, parmi les blessés et les morts, les premières formes de la survie ».
Philippe Lançon, en écrivant, en construisant une œuvre littéraire, est l’auteur de sa propre reconstruction physique.

Le lambeau de Philippe Lançon aux Éditions Gallimard

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